Non, non, je n'y serai pas !
Jamais, je ne prendrai le départ, ni du Paris-Roubaix cyclotouriste (au mois de juin, je crois), ni du Paris-Roubaix cyclosportif (qui s'est déroulé dimanche 1er avril, il y en a qui doivent encore avoir mal au c.. !). jamais on ne me fera rouler sur ces pavés disjoints, dans la "bouillasse" des chemins creux de Ch'nord ! Je hais les pavés ! 50 mètres de pavés décoratifs dans n'importe quelle petite ville prétentieuse suffisent à me mettre en rage... alors pensez donc, des dizaines de kilomètres de cailloux disjoints !!!
Mais il faudra bien qu'un jour prochain j'aille regarder passer les forçats de la route qui, ici mieux qu'ailleurs, méritent leur surnom.
Mais pas question bien sûr pour moi de raconter ici l'histoire de la Pascale (qui cette année peut retrouver son surnom) : d'autres l'ont fait, et de quelle façon lorsqu'il s'agit du livre de Pascal Sergent. Et il y aurait tant à dire, tant à montrer d'images !
Pourtant, je me dois de rendre hommage à tous ces héros qui souffrirent sur les pavés du Nord, d'Arenberg au carrefour de l'arbre, de la côte de Doullens au vélodrome de Roubaix !
Photo prise lors de mon "Tour de France 1959", durant lequel je me suis évertué à éviter les maudits cailloux !
C'est en ouvrant la première reliure contenant ma collection que j'ai trouvé ce N°2 de Miroir du Cyclisme (Première série bimestrielle de la revue parue en 1960).
L'édito de Maurice Vidal plante le décor, la photo aussi qui nous montre Fausto Coppi lui-même (Qui vient de mourir au début de cette année 1960.) !
UNE " CLOCHE "
NE GAGNE JAMAIS LA PASCALE
De Paris à Roubaix, la route n'est
pas gaie. Elle n'est pas bordée de jonquilles, comme celle du National, avant que celui-ci ne devienne algérien à part
entière. Elle n'est pas écrasée de soleil, comme celle qui mène de Bordeaux à Paris. Elle ne prend pas les teintes
rousses de' l'automne commençant,
ainsi que le chemin de Tours.
La
route de Roubaix est noire comme la route du labeur quotidien, pavée de -bonnes intentions
comme l'enfer. Son horizon
est bordé par les terrils, les crassiers, les corons tristes d'apparence, où vit
pourtant un peuple de courageux, où naissent, vivent et meurent des hommes et des femmes aux poumons couleur de la route, ces
mineurs dont un poète a dit qu'ils tiraient
pour nous « les marrons du feu de
l'hiver ».
La
route de Roubaix ne connaît
pas la paresse. Ni dessous
ni dessus. Car les coureurs qui l'empruntent le jour de la « Pascale » (elle ne
mérite plus son nom, mais elle l'a gardé) sont dignes de ceux qui les regardent passer. Balayés les insouciants mal préparés, écrasés
les téméraires ou les inexpérimentés.
Paris-Roubaix se fait respecter des plus grands.
Chaque année, quelles que soient les
fluctuations du sport
cycliste, les meilleurs pédaleurs sont au départ. Deux mois à l'avance, ils
ont pensé à cet instant. Ils sont prêts à se méfier des premières échappées
classiques. D'avance,
leurs muscles sont bandés pour la côte de Doullens,
en haut de laquelle il faut se
présenter en bonne place, car c'est là que se
distribuent les tickets pour les « bordures ».
Ils
ont préparé
une première course qui lés amènera en tête aux portes de l'enfer. Et là, sur les
pavés disjoints, qui leur secouent
atrocement le cœur, qui leur retournent l'estomac, qui usent les bras les plus
solides, dans la poussière, dans la boue
souvent, ils savent qu'ils auront une nouvelle
course à disputer, la plus terrible du cyclisme. Celle d'où ne sortent que des courageux, des coureurs de race. Celui qui sort victorieux de l'enfer possède
un nom ou s'en fait un. C'est la pure
loi de Paris-Roubaix...
Maurice VIDAL.
Un grand article de François Terbeen narre chronologiquement la geste de la Classique nordiste d'Octave Lapize, auteur héroïque d'un légendaire triplé en 1909,1910 et 1911...
...à Bobet, Van Steenbergen et autres Flahutes flingueurs . Mais ce n'est pas mon propos aujourd'hui.
Car, Paris-Roubaix, c'est avant tout l'Enfer pour la multitude des concurrents ainsi que le montre Pellos.
Alors je préfère laisser la plume à Robert Chapatte qui raconte la course telle qu'il la vécut de l'intérieur.
Paris - Roubaix, c’est comme ça !
Par Robert Chapatte
Ce n'est pas
par hasard ou par favoritisme que
Paris-Roubaix a été
reconnue « la plus belle des
classiques ». Personne ne lui conteste ce
titre. Surtout
pas les coureurs
qui n'ont
pas eu besoin
d'une décision officielle
pour en faire une épreuve protégée
avant la lettre.
Posez
la question : « Préférez-vous
être champion du monde ou remporter Paris-Roubaix ? » La
réponse sera Champion
du monde... il y a le maillot, mais
Paris-Roubaix... ça marque ».
C'est vrai une auréole de super-routier s'inscrit autour du nom d'un vainqueur
de Paris-Roubaix. Pour tous il est sorti en dominateur d'un enfer.
« L’enfer
du Nord » comme
dit un jour un
reporter sans songer, peut-être, qu'il faisait
ainsi entrer les pavés dans la
légende.
Le
long des
corons, sur les trottoirs chaotiques, à
peine plus cyclables que les pavés inégaux plantés au petit bonheur, la face burinée par l'effort, noircie par la
poussière charbonneuse, le coureur
dispute son propre critérium.
Je n'en connais
pas un
qui ne tire une joie réelle d'une bonne course
ce jour-là. Même si la victoire ne l'attendait pas au
bout de la piste.
qui ne tire une joie réelle d'une bonne course
ce jour-là. Même si la victoire ne l'attendait pas au
bout de la piste.
Dans la
saison d'un coureur, Paris-Roubaix
prend place au
programme d'honneur. Les épreuves qui précèdent le départ sont disputées en fonction de la course
vers le Nord. Et à Saint-Denis, l'électricité est dans
l'air. Descendus
de leurs
plaines flamandes, les
mollets frétillants et les yeux pleins d'espoirs, on regarde ainsi chaque année des jeunes flahutes
se préparer nerveusement à
la consécration.
Claës, De
Ryck, Van
Daele, Foré…Les voilà ceux qui ont touché au sommet comme l'ont fait Van Steenbergen, Coppi, Bobet, De Bruyne les maîtres qui, sans Paris-Roubaix, ne seraient pas ce qu'ils sont.
Aucune
protestation,
aucune réprobation ne diminuèrent
le succès
des premiers nommés. D'un seul
coup, ils s'étaient installés parmi les
meilleurs. Et entre eux,
ces meilleurs, ne diminuent pas
leurs victoires.
Un
gagnant de Paris-Roubaix devient un immortel de l'académie
du cyclisme.
Aucune
autre classique en
ligne
ne
peut se prévaloir d'un tel privilège.
Les
"bordures" de
Paris-Roubaix,..
En contre
partie Paris-Roubaix exige
de ses acteurs la
condition « nec plus ultra
». Déjà
qu'en pleine
forme l'on
n'est pas certain de pouvoir résister
aux impitoyables
bordures qui, de
Creil à Arras, préparent
le final, il est en conséquence recommandé de
s'abstenir si l'on doute.
C’est ainsi que Doullens
et sa côte qui ne marque
pourtant qu'un bref passage donne chaque année le signal des
premiers soulagements du peloton... quelques unités à la recherche du second souffle, insuffisamment préparés à l'Enfer.
On
croirait à un jeu des coureurs de tête. Ils avalent cette bosse entre deux tartelettes tout comme
si l'arrivée de la course avait lieu au sommet.
Résultat, les faiblards y
laissent la peau. Mais il faut
voir sans doute en cette curieuse façon de faire une
subsistance à cette ancienne tradition qui voulait
que le premier à Doullens soit le premier à Roubaix.
Il n'est pas, à ma connaissance, de pareil exemple
depuis 15 ans.
...Mais cela n'empêchera pas cette fois encore
Doullens d'être pris d'assaut. Le pli est pris. Les jeunes d'aujourd'hui, imprégnés par leurs anciens de
l'esprit de Paris-Roubaix, ont pendant la courte
ascension de la côte picarde, le moyen de se prouver leur propre
force. Sachez que cela est très bon pour leur moral en vue de la suite des événements.
Car
sans prendre le temps de respirer, sur le plateau avant Arras. les bordures vont
s'organiser et
il est toujours préférable d'avoir sa petite place
assurée dans la première bordure.
Or,
comment l'obtenir cette place de choix si l'on ne se pointe pas au sommet de la
côte dans les 15 premiers...
Autant que les pavés,
les bordures décident de Paris-Roubaix. Que
le vent soit favorable ou de côté, on
change l'orientation de l'éventail, c'est tout. Et les Paris-Roubaix qui laissèrent un médiocre souvenir aux suiveurs sont ceux disputés avec le vent de face qui, en étouffant toutes les échappées
dans l'œuf, amenaient un peloton
encore important aux approches de
l'arrivée.
Mais
ces mêmes suiveurs conserveront
longtemps le souvenir du Paris-Roubaix record
de 1948 poussé de bout en bout par un véritable vent de tempête.
Avec Caput, Magni et un
inconnu à 45 à l'heure
Jeune
professionnel chez A. Magne, je n'avais pu me
décider à courir
les Paris-Roubaix 46 et 47. La pensée de déguster
un bon coup de trique
entre deux pavés
ne me disait
rien et j'avais préféré participer, en tant que pistard,
à la réunion d'attente de l'arrivée.
C'est ainsi que je vis Claès remporter son deuxième succès.
Mais
en 48, Tonin en me communiquant le programme, fut
formel : « Vous
courrez Paris-Roubaix
! » II
s'y était pris
trois mois à l'avance. Cen'était
pas trop pour me faire à cette idée…
Bien préparé, mais résigné par
avance, me voici donc au départ.
La météo avait prévu la veille : demain,
vent violent du sud-sud-est. Pour être violent, il fut violent ce
vent. Un véritable sprint marqua le départ au barrage de Pierrefitte. A croire
qu'aucun coureur ne sentait les pédales. Et déjà quelques finauds qui voyaient
grands roulaient sur le 14 dents qui fit ce jour là son entrée en
compétition... Je sais évidemment que depuis on voit encore plus grand mais ce
jour là, pour le débutant que j'étais, le 14 dents des autres me fit froid dans
le dos. Personnellement, j'étais muni du 49 x 15 cher à A. Magne. Mon ami
Caput avait le même braquet. Et d'entrée il me mit dans le mauvais coup. « Si on se taille
pas du peloton, on va se casser la g... Crois moi, dans la première bosse, on
fait la valise. Et devant on sera peinard ».... Vous parlez... mais je ne
savais pas encore à l'époque qu'il ne faut pas suivre tous les conseils
de Caput à la lettre.
Sitôt dit, sitôt fait. Dans la côte d'Ecouen, on attaque, on descend à toute allure l'autre versant, il y en a d'autres avec nous
et sur le plat on se relaye toujours
au sprint Après deux
kilomètres, je me retourne. Nous avons deux cents mètres. C'est
parti mon kiki... Et ça va aller loin... Et ça va aller vite.
Quand on commence à s'installer
dans notre petit train de plaisir, je regarde nos compagnons. Il y a là Kergoet,
Kléber Piot, un vieux copain, Danielou, un jeune nantais (il a un 14),
Magni, l'as italien et un grand costaud qui porte un drôle de maillot à larges carreaux verts et oranges. Pas besoin de réfléchir pour comprendre que
c'est un Italien. Mais qui ? Magni, à qui je fais un signe interrogateur pour
connaître l'identité de ce jeune homme aux épaules de déménageur me fait
comprendre qu'il est trop occupé pour me répondre. Alors, après tout qu'importe. Le principal c'est qu'il roule.
Je n'ai su que par les journaux du
lendemain le nom de notre gaillard qui devait
accomplir un extraordinaire Paris-Roubaix : Monari. Ça ne vous dit rien ? Je m'en doute. Ce fut sa
grande performance. La seule, mais croyez-en un témoin : elle
est de taille.
Avec sept unités, l'échappée ne s'annonçait pas trop mal. D'autant que l'ardoisier vint nous annoncer à Creil : « 1
minute d'avance ».
Mais tour à tour
Kergoet et Piot s'arrêtèrent pour crevaison. A l'allure de la course, le
changement de roue ne leur était d'aucune
utilité. Il leur était pratiquement impossible de revenir. Sur le 49 x 15 nous
étions comme sur home-trainer. Nous pédalions dans le vide.
Le coup double de Van Steenbergen
A BRETEUIL, 2'
d'avance, mais Danielou disparaît à son tour. Plus que 4. Et toujours le bruit des
boyaux qui sifflent sur le macadam.
De temps à
autre Caput crie
à Magni qui vient
de prendre
le relai :
« Allons Fiorenzo, «
chiqué » pas... presto... presto ».
Evidemment avec l'accent « italien » de P'tit Louis, ça vaut son pesant et
pour moi ça me passe le temps. A l'autre, le grand aux carreaux, Louis ne dit
rien. Il n'y a rien à lui dire à celui-là. Les yeux fixés droit devant lui, il
fonce, bien en ligne, sans jamais ralentir la cadence.
Robert Chapatte et ses compagnons d'échappée |
Avant Amiens, quand nous
comptons 3’, l'ardoisier revient nous annoncer que la moyenne dépasse 45 à l'heure. Pas étonnant dans ce cas que
les bornes semblent aussi rapprochées. Et parce qu'il veut nous donner le moral
et sans doute parce qu'il commence à y croire, Louis crie : « Ah, ils doivent
pas se marrer derrière ». Comme si nous, à l'avant, on se tapait sur les
cuisses.
Puis c'est Doullens,
toujours tous les quatre. Au pied, Magni s'écarte encore en simulant des ennuis de dérailleur (son truc favori quand
il ne veut pas mener), nous le relayons et Monari vient à son tour à 200 mètres
du haut. Là le vent a changé, il souffle toujours favorablement, mais de côté.
Ce qui ne change pas grand chose pour 4 coureurs ensemble mais pour le gros
peloton les bordures vont devenir plus serrées... Mais tout à coup, alors que
le sommet est là tout proche, en me mettant en danseuse, j'entends deux
claquements secs à la roue
arrière. Le dérailleur en
frottant les rayons en a fauché deux au passage. La roue touche au frein.
Robert à pied... |
J'ai mis pied à terre pour écarter l'étrier du frein. Mais Caput,
Magni et l'Italien sont déjà loin. Je repars avec 400 mètres. Et jusqu'à la
sortie d'Arras je les chasserai. Sur les premiers pavés, d'autres rayons cassés m'obligeront à attendre Antonin Magne pour changer
de roue et mon Paris-Roubaix s'arrêtera là.
Dommage car les échappés n'ont été rejoints qu'à 20 kilomètres
de l'arrivée. Magni subitement guéri des maux d'estomac
dont il se plaignait au début de la course, et son dérailleur
miraculeusement réglé, a senti qu'il pouvait remporter un fantastique Paris-Roubaix. Et il a brutalement démarré sur les trottoirs, Caput et leur
dernier compagnon ont été décramponnés mais Magni a réagi trop tôt. De l'arrière un premier bolide est revenu : Milo Carrara,
qui en me passant un peu avant m'avait laissé l'impression qu'il était en avion.
Puis B. Gauthier à son
tour, a surgi. Pas plus heureux que Carrara, il fut rejoint par deux superchampions
qui le laissèrent sur place : Van Steenbergen
et Idée.
« Mimile
» fit ce jour-là une fin de course qui souleva
l'admiration de tous les suiveurs. Mais au sprint contre Rik, il ne put rien
tenter.
Et c'est ainsi qu'en
remportant son premier Paris-Roubaix Van Steenbergen devint aussi recordman de vitesse sur route : le
ruban jaune était porté à 43 km 800, mais une décision des commissaires de
course devait le ramener à 43 km 612.
Coppi en
50... et Bobet en 51 leurs deux sommets
EN 1949, dans le final pavé, A. Magne comptait cinq Mercier
sur les sept
hommes qui, à 10 km de la ligne, roulaient 500 mètres
devant le peloton. A 5 km du
but il n'en comptait plus que deux.
Moujica et l'auteur de ces
lignes. Tous les autres avaient
crevé. Et à
Hem, dernière traversée
pavée avant Roubaix,
ce fut mon tour de stopper pour crevaison. On sait que
Moujica, contre Leenen et Mahé, dut
se contenter de la
troisième place. Mais André Mahé, toujours présent dans les grandes batailles des classiques, méritait bien de voir sa grande valeur
confirmée par un succès dans la plus huppée de toutes.
Malheureusement sa victoire
fut diminuée par une erreur de
parcours dont il n'était nullement responsable à l'entrée du vélodrome et
c'est ainsi que le Paris-Roubaix de 1949 comporte deux
vainqueurs ex aequo : Mahé et Serse Coppi, vainqueur du sprint du peloton qui
luttait pour la cinquième place.
Maurice Diot, dans le sillage de Coppi |
En 1950, Fausto Coppi
remporta l'une de ses plus grandes victoires. Je voudrais seulement rapporter que lorsque détaché du peloton avec Diot, à la suite de son coup
de force du ravitaillement d'Arras, il nous tomba sur le paletot du côté
d'Hénin-Liétard alors qu'avec Sciardis, Costes et deux Belges, nous pensions
naïvement avoir la course en main. J'ai nettement éprouvé le sentiment
que Paris-Roubaix appartenait à ceux qui ont « la taille au-dessus ».
Maurice Diot, longtemps
accroché au sillage de Fausto, ce
jour là eut bien raison, après l'arrivée, de déclarer Coppi hors concours.
En 1951 le plus fort de
tous était Louison Bobet, et
venait ensuite P. Barbotin. Tous deux venaient précisément de
remporter Milan-San Remo et le National. Ils étaient, je l'affirme,
capables d'un autre doublé dans Paris-Roubaix. Mais sur le plateau entre
Doullens et Arras, tous deux crevèrent alors que les bordures avaient fait
monter les aiguilles des compteurs à 50. Barbotin réussit l'exploit incroyable de rejoindre
en sautant d'une bordure à l'autre avant de crever de nouveau.
Quant il le vit passer notre bordure, Schulte, qui pourtant en a vu pas mal
dans sa carrière, siffla puis hurla un « god-furdom' » à vous
fendre les oreilles.
Caput qui (comme par
hasard) était encore près de moi me
dit : « Tu as compris... s'il avait couru le Tour du
Vaucluse ».
Car le dimanche précédent Rémy, A. Rolland et moi avions pris les 3 premières
places du Tour du Vaucluse et nous étions encore là réunis avec Schulte, Caput et d'autres
ressentant tout à coup combien le Tour du Vaucluse... était éloigné de
Paris-Roubaix.
Quant à Louison,
finalement deuxième cette année là, il remonta tout le monde sauf Bevilacqua qui
avait trop d'avance. Mais ce fut la meilleure course du grand Louison.
Mon dernier souvenir de
Paris-Roubaix date de 1954 où,
sortant des 6 Jours de Paris, les six daymen après un départ laborieux devaient
obtenir des accessits flatteurs derrière le vainqueur Raymond Impanis.
Blusson et Surbatis sprintèrent parmi les 7 pour la première
place mais avec Bobet, Varnajo, Costes, Caput nous aurions pu, peut-être, les
rejoindre « in extremis » si une chute collective ne nous avait emmêlés sur
le trottoir qui mène de Hem au virage de l'église à 4 kilomètres de l'arrivée.
Profondément coupé à l'index gauche, j'étais reparti avec
Louison quand au bord de la route je vis une bonne femme exprimer un rictus
douloureux en montrant mon visage.
Elle me croyait gravement blessé en voyant le sang qui barrait le front
et la joue, mais c'était en portant le doigt à ma figure pour enlever de la
poussière que j'avais laissé ces traces de sang.
Et bien vous me croirez si
vous voulez, en mettant pied à
terre sur la piste quelques instants plus tard, je n'ai pas essuyé ce sang qui
me faisait passer pour un héros de Paris-Roubaix.
Maintenant
lorsque sur le tansad de la moto je roule près d'eux dans l'Enfer de Montchaux ou de Mons en Pévéle et que je vois
un jeune découvrir avec effroi cet aspect du cyclisme de toujours,
j'ai envie de lui dire : « Eh oui, c'est cela mon petit gars, Paris-Roubaix...
C'est pourquoi elle est la plus belle de toutes ! »
Gueules de mineurs de fond : on a presqu'envie de chanter "Les corons". Alors, rendez-vous dimanche ? ...devant la télé ou sur le bord de la route ?
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