E - CHOU - BOU - LAINS
J'ai parfois aperçu à un carrefour un panneau annonçant ce village. Mais je crois jamais n'y être passé, ni à pied, ni à vélo, ni en voiture. Pourtant le nom me plaît beaucoup. C'est encore mieux ainsi :
E - CHOU - BOU - LAINSe
Alors quand Laurence m'a dit qu'elle voulait faire une grande balade en Seine et Marne en évitant les bosses, j'ai tout de suite pensé aller vers là-bas :
E - CHOU - BOU - LAINS(e)
En route donc, dès ce samedi matin, vers le sud de la Brie.
Après Gastins, nous avons roulé sur des routes que nous n'avions jamais encore empruntées.
Paysages un peu... industriels.
Surtout lorsque nous passons à proximité de la raffinerie pétrolière de Grandpuits. Sous ce soleil ce n'est pas trop lugubre.
Mais nous préférons quand même la Seine et Marne des petites fleurs.
Bien vite nous arrivons sur des routes comme nous les aimons, la circulation automobile est ici minimale et en ces temps où l'on parle de sauvegarder la biodiversité, ces haies le long des routes sont une heureuse surprise ! Pour la biodiversité, bien sûr, car il doit y en avoir des petites bêtes là-dedans, mais aussi pour protéger le cycliste des vents mauvais.
Ce petit coin, en bordure de la forêt de Villefermoy, est fort verdoyant et bleu.
A chaque fois, je pense à cette chanson de Ferrat, sur un poème d'Aragon : "Devine".
Un grand champ de lin bleu parmi les raisins noirs
Lorsque vers moi le vent l'incline frémissant
Un grand champ de lin bleu qui fait au ciel miroir
Et c'est moi qui frémis jusqu'au fond de mon sang
Devine
Un grand champ de lin bleu dans le jour revenu
Longtemps y traîne encore une brume des songes
Et j'ai peur d'y lever des oiseaux inconnus
Dont au loin l'ombre ailée obscurément s'allonge
Devine
Un grand champ de lin bleu de la couleur des larmes
Ouvert sur un pays que seul l'amour connaît
Où tout a des parfums le pouvoir et le charme
Comme si des baisers toujours s'y promenaient
Devine
Un grand champ de lin bleu dont c'est l'étonnement
Toujours à decouvrir une eau pure et profonde
De son manteau couvrant miraculeusement
Est-ce un lac ou la mer les épaules du monde
Devine
Un grand champ de lin bleu qui parle rit et pleure
Je m'y plonge et m'y perds dis-moi devines-tu
Quelle semaille y fit la joie et la douleur
Et pourquoi de l'aimer vous enivre et vous tue
Devine
E - CHOU - BOU - LAINS(e) :
Nous y sommes ! Petite visite de ce charmant village qui comptait, si j'en crois "Le dictionnaire de la Seine et Marne" (Editions Delattre) , 536 habitants en 2016 (après en avoir eu 621 en 1890).
Habitants que l'on nomme les Echouboulinois.
Il est 13H20, la température est de 17°C et le vent souffle du Nord-est à une vitesse de 13Km/h. Il va nous être contraire sur le chemin du retour. Zut, alors...
Il nous faut reprendre des forces et nous choisissons cette belle pelouse pour notre traditionnel pique-nique.
La vue sur le village d'Echouboulains est très agréable, un petit côté "La force tranquille".
Il nous faut reprendre des forces et nous choisissons cette belle pelouse pour notre traditionnel pique-nique.
La vue sur le village d'Echouboulains est très agréable, un petit côté "La force tranquille".
Quand nous reprenons la route, nous passons près de cette superbe ferme et nous retrouvons des chemins plus familiers à partir de Coutençon.
Malgré tout, nous sommes surpris par le mauvais état de la route entre Coutençon et Montigny Lencoup. Pendant plus d'un kilomètre, nous roulons sur une "Route déformée" si l'on en croit le panneau. En fait, cette route est complètement défoncée. Heureusement le temps est sec !
Ici, c'est une vieille plaque de cocher qui nous indique la direction à suivre pour arriver à Gurcy le Chatel, sans quoi nous nous serions sans doute retrouvés sur une grande route. Merci à nos anciens cantonniers, ces panneaux sont quand même installés depuis presque deux siècles... et ils sont encore lisibles.
A Chalautre la Reposte, nous empruntons une jolie petite route qui nous mène tranquillement à Donnemarie Dontilly. Petite route que j'avais vainement cherchée à plusieurs reprises à Donnemarie : j'ai bien repéré les lieux aujourd'hui.
Nous faisons une petite pause près de l'ancienne gare de Donnemarie.
J'y étais passé voici quelques mois lorsque j'avais suivi le cours de l'ancienne ligne de chemin de fer qui menait De Bray sur Seine à Sablonnières
Souvent nous nous sommes égarés dans cette petite ville du Montois mais, ça y est nous arrivons à traverser Donnemarie Dontilly sans en faire trois fois le tour avant de nous retrouver sur une route que nous ne voulions pas prendre. En plus, c'est encore un vieux panneau qui nous rassure que nous sommes sur le bon chemin.
La région que nous traversons s'appelle le Montois et donc nous... montons, en traversant Thénisy, puis en allant vers Sognolles. Après le parcours redevient plat, nous revenons en Brie.
Après les traversées de Maison Rouge, de Chenoise et de la forêt de Jouy, routes souvent parcourues, nous arrivons à Bezalles.
En prenant cette route que nous n'empruntons jamais, je me souviens d'une vieille légende que j'ai découverte voici bien longtemps dans le livre "La Brie qui rêve".
Malgré tout, nous sommes surpris par le mauvais état de la route entre Coutençon et Montigny Lencoup. Pendant plus d'un kilomètre, nous roulons sur une "Route déformée" si l'on en croit le panneau. En fait, cette route est complètement défoncée. Heureusement le temps est sec !
Ici, c'est une vieille plaque de cocher qui nous indique la direction à suivre pour arriver à Gurcy le Chatel, sans quoi nous nous serions sans doute retrouvés sur une grande route. Merci à nos anciens cantonniers, ces panneaux sont quand même installés depuis presque deux siècles... et ils sont encore lisibles.
A Chalautre la Reposte, nous empruntons une jolie petite route qui nous mène tranquillement à Donnemarie Dontilly. Petite route que j'avais vainement cherchée à plusieurs reprises à Donnemarie : j'ai bien repéré les lieux aujourd'hui.
Nous faisons une petite pause près de l'ancienne gare de Donnemarie.
J'y étais passé voici quelques mois lorsque j'avais suivi le cours de l'ancienne ligne de chemin de fer qui menait De Bray sur Seine à Sablonnières
Souvent nous nous sommes égarés dans cette petite ville du Montois mais, ça y est nous arrivons à traverser Donnemarie Dontilly sans en faire trois fois le tour avant de nous retrouver sur une route que nous ne voulions pas prendre. En plus, c'est encore un vieux panneau qui nous rassure que nous sommes sur le bon chemin.
La région que nous traversons s'appelle le Montois et donc nous... montons, en traversant Thénisy, puis en allant vers Sognolles. Après le parcours redevient plat, nous revenons en Brie.
Après les traversées de Maison Rouge, de Chenoise et de la forêt de Jouy, routes souvent parcourues, nous arrivons à Bezalles.
"Au
commencement du siècle, Bezalles n'était pas comme aujourd'hui
encadré par un triangle de belles routes qui permettent aux
habitants de se porter dans toutes les directions sans même crotter
les jantes des roues de leurs voitures. L'unique chemin alors
praticable traversait le village pour descendre vers l'église
isolée, entourée du cimetière, dans la prairie à quelques
centaines de toises au-dessous...
"Le loup et le chien" Jean de La Fontaine -
Montigny lès Condé (02) AVRIL 2018
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En
ce temps-là, les loups étaient très communs dans la contrée. De
la forêt de Chenoise, à deux pas, ils se répandaient la nuit dans
les alentours qu'ils terrorisaient au point que les bonnes femmes
n'osaient pas sortir de la veillée sans être en troupe, ou
escortées de leurs maris portant des lanternes à feu clair pour
tenir à distance les loups qui craignent la lumière.
En
ce temps-là également, la paroisse avait pour chantre, sacristain,
sonneur d'angélus, le père Bastien Thomas, qui cumulait ses emplois
cléricaux avec celui de cantonnier communal, lequel emploi
n'exigeait pas grande science géométrique, puisqu'il consistait à
combler les plus profondes ornières avec des pierres brutes et à
élaguer par-ci par-là, les ronces et les épines qui obstruaient
par trop les abords des chemins.
Bastien
Thomas avait pour compagne une bique qu'il appelait Bellotte et qui
le suivait partout où il allait, broutant le long des talus quand le
maître terrassait, ou s'engraissant de l'herbe du cimetière pendant
que le sacristain remplissait ses diverses fonctions dans l'église.
Mais, de par l'ordre du curé, l'entrée dans le saint lieu était
formellement interdite à la bête cornue dont le bêlement
intempestif parodiait par trop le chant nasillard des clercs
paroissiaux.
Ceci
dit, entrons en matière. C'était le 1er décembre, jour
de la fête de saint Éloi, très honoré dans ce pays de culture. Le
curé de Bannost, qui desservait Bezalles, attendu pour déjeuner
chez un grand fermier voisin, avait pour ainsi dire escamoté
l'office. Bastien Thomas, aussi vif que son curé à quitter
l'église, s'était rendu, toujours escorté de Bellotte, chez le
fils de son ancien maître, Jean Verrier, cultivateur, qui n'oubliait
pas le vieux serviteur de la famille et le jour de la fête de saint
Éloi, « ne faisait boire que du vin et pas de cidre à son invité
». Grâce à la bonne cuisine arrosée d'un vin frais et abondant,
l'après-midi avait passé vite, et, le soir, l'heure de l'angélus
aurait été oubliée sans l'intervention de Mme Verrier. La
fermière, plus orthodoxe que ses hôtes, aurait cru la journée
maudite, si, chaque soir, à l'heure voulue, ses enfants n'avaient
répété au son de la cloche paroissiale L'Ave Maria traditionnel.
Ce
soir-là, il faisait grand froid; la bise du nord-ouest enfilait en
plein la petite vallée où se trouve l'église. A la sortie d'une
pièce bien chaude, le père Thomas en pleine digestion se sentit
tout à coup comme glacé; pour une autre cause que nous allons
bientôt connaître, la bique se serrait contre ses jambes et
augmentait encore le trébuchement bien explicable de son maître.
Arrivé à la porte de l'église, le vieux sacristain eut l'envie d'y
faire entrer Bellotte de plus en plus blottie contre lui. Mais se
rappelant à temps l'énergique défense du curé, il plaça sa
fidèle compagne le mieux qu'il put à l'abri du froid, et, l'ayant
attachée au moyen d'une corde à une petite croix de bois, il
pénétra dans l'église, laissant la porte entrebâillée pour ne
pas trop isoler la bique dont les bêlements n'avaient rien
d'anormal. Comme le sonneur avait encore quelques minutes pour
attendre l'heure de l'angélus, il entra dans la sacristie où rien
n'avait été rangé à la suite de l'office du matin. Là, le père
Thomas ayant, histoire de se réchauffer, vidé le restant de la
burette au vin, il s'assit, la tête un peu lourde, dans le fauteuil
du curé où il s'assoupit bientôt assez pour ne plus percevoir les
cris de plus en plus alarmants de sa bonne amie aux abois.
Un
loup, un affreux loup, rôdait dans ces parages. Sentant l'odeur de
la chair fraîche, il fit le tour du cimetière dont la porte était
fermée. Vainement il essaya de la pousser. La bique, qui depuis
longtemps le devinait, maintenant distinguait dans l'ombre ses
yeux qui brillaient comme deux escarboucles; elle multipliait ses
efforts pour se dégager de son entrave : la croix s'ébranlait, mais
ne s'arrachait pas. Enfin quand d'un bond le loup eut franchi la
clôture, un dernier effort désespéré de Bellotte fit casser la
croix près de terre et permit à la pauvre bête de se sauver dans
l'église, traînant derrière elle la croix attachée à la corde.
Cette croix sautant par bonds comme si elle eût été secouée par
une puissance mystérieuse fut nuisible au loup qui recevait ou dans
les pattes, ou dans le museau, ou dans les yeux, des chocs qui
augmentaient sa fureur, mais paralysaient ses efforts.
Ne
trouvant pas son maître là où elle le croyait, Bellotte, de plus
en plus affolée, fit demi-tour dans le chœur pour regagner le
cimetière où elle allait être impitoyablement dévorée sans un
miracle peut-être unique dans les annales de n'importe quelle
religion.
La
bique ayant franchi le seuil de la porte se trouve tout à coup
arrêtée. C'en est fait d'elle ! Un dernier bond, et le loup tient
sa proie. Mais au lieu de saisir la bête, c'est contre du bois qu'il
se frappe le nez : une des branches de la croix, ayant agrafé le
battant ouvert de la porte, l'avait fermée et séparé ainsi le
bourreau de la victime.
|
Par
la faible ouverture que laissait l'épaisseur du bois de la croix, le
carnassier pouvait sentir et voir à quelques pieds devant lui la
pauvre biquette tremblante, anéantie, n'ayant heureusement plus la
force de tirer sur la petite croix de bois blanc presque déclouée
par les grands chocs qu'elle avait reçus. Un seul témoin de cette
scène, mais bien loin : la lune, pour bien voir le drame qui se
dénouait dans ce coin-là, projetait ses rayons les plus clairs à
travers les grands peupliers défeuillés.
Enfin,
le père Bastien Thomas, réveillé par le bruit, sortit de la
sacristie et distingua dans l'ombre un animal qui lui parut
fantastique : c'était le loup qui, terrorisé par l'apparition de la
lumière, se dressait furieux contre la porte de l'église. Ne
comprenant rien encore à ce qui venait d'arriver si ce n'est qu'il y
avait du danger pour sa Bellotte dont il entendait les gémissements
au-dehors, Bastien Thomas enjamba la fenêtre de la sacristie, courut
couper la corde qui tenait à la croix et ferma à clef la porte de
l'église, laissant ainsi enfermé le méchant loup, honteux et
confus d'avoir été la dupe d'une pauvre bique.
Inutile
de raconter en détail ce que firent le lendemain les habitants de
Bezalles pour détruire le loup qui fut fusillé par les fenêtres de
sa prison. A la grande joie des enfants, son cadavre fut traîné par
les chemins à travers les pays de Bezalles, Beauregard, Boisdon et
Bannost.
Si
ce fait aussi curieux que véridique s'était passé en Angleterre,
on aurait conservé la peau du loup, empaillé la bique après sa
mort et conservé la croix dans un musée. Mais à Bezalles la croix
fut replantée à sa place dans le cimetière où depuis longtemps
elle est tombée en poussière, la peau du loup fut enfouie avec la
bête maudite, et quand Bastien Thomas vint à mourir de la bronchite
qu'il avait attrapée ce soir-là, la bique, devenue stérile, après
de si grandes émotions, fut impitoyablement vendue, tuée, salée et
mangée comme si elle eût été le plus simple animal.
La
vieille église, célèbre dans toute la contrée par le miracle que
nous venons de raconter ci-dessus, sera bientôt démolie. Faute de
réparations opportunes elle tombe en ruine. Ses débris, transportés
dans un autre endroit, serviront à l'édification d'un temple plus à
proximité de la fervente piété des habitants de Bezalles; puis la
charrue effacera jusqu'au souvenir de l'endroit où l'on vit, chose
pourtant bien rare en ce monde : l'humble triompher du méchant."
Une
variante de cette légende prétend que c'est le curé de Champcenest
qui captura le loup et alla le pendre au hameau situé entre ce
village et Beton Bazoches, appelé depuis... Loupendu !
Cette histoire, contée par Paul BRU dans ce livre, est une légende
voyageuse, on en trouve diverses variantes partout
en Europe.
A
Bezalles, le 23 septembre 1882, un arrêté préfectoral ferma
l'église, située dans le cimetière et à la fin de 1892, une
nouvelle église fut construite à l'emplacement actuel, au coeur du village.
Depuis,
elle est dédiée à Sainte Marie Madeleine, la disciple de Jésus.
Comme sur nombre des ses représentations, la sainte est accompagnée
d'une tête de mort. Si j'en crois Wikipédia : "...le
crâne symbolise le temps destructeur et la vanité de tout
attachement humain aux choses périssables. Il peut être également
l'attribut de la mélancolie ou connoter la repentance, la méditation
et la préparation à la mort. Il est l'attribut de Marie
de Magdala dans les représentations de Marie-Madeleine
pénitente."
Mais
à Bezalles, les bâtisseurs de la nouvelle église à la fin du
XIXème siècle ont ajouté à la gauche de Marie Madeleine une
sculpture de la chèvre...
...et,
à sa droite, c'est le loup qui trône. A égalité, en somme,
car
sans le méchant loup, point de biquette héroïque !
Le loup serait revenu en Brie comme je l'ai évoqué dans un précédent billet : Gare à vous, biquettes ! Car aujourd'hui toutes les églises sont fermées et les bedeaux ainsi que les curés sont de plus en plus rares.
Quant à nous, nous n'en avons pas vu, de loup, pas plus que de biquette, de bedeaux, ni de curés !
Par contre, tout près de l'église de Bezalles, il y a un distributeur automatique de pommes de terre : s'il a quelques pièces, le loup pourra toujours manger des patates !...
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