Je viens de récupérer les documents et médailles que Michèle Chardon m'avait gentiment prêtés pour être exposés à l'Office du tourisme de Saint Quentin en Yvelines l'été dernier à l'occasion des PBP qui partaient et arrivaient dans cette ville de l'ouest parisien.
C'est l'occasion pour moi de revenir sur les aventures cyclistes de René Chardon voici 75 ans et plus...
Mais tout d'abord, qu'est-ce qu'une Diagonale ? Je suis allé chercher plus d'informations sur le site des "Diagonales de France".
"Les DIAGONALES DE FRANCE sont des randonnées de cyclotourisme qui consistent à relier, dans des conditions définies par le règlement des Diagonales, deux sommets non consécutifs de l'Hexagone national. Un DIAGONALISTE est un cyclotouriste ayant réussi au moins une Diagonale officiellement homologuée par la F.F.C.T
Mais tout d'abord, qu'est-ce qu'une Diagonale ? Je suis allé chercher plus d'informations sur le site des "Diagonales de France".
"Les DIAGONALES DE FRANCE sont des randonnées de cyclotourisme qui consistent à relier, dans des conditions définies par le règlement des Diagonales, deux sommets non consécutifs de l'Hexagone national. Un DIAGONALISTE est un cyclotouriste ayant réussi au moins une Diagonale officiellement homologuée par la F.F.C.T
Alors que
c'est Vélocio qui, le premier en 1929 employa le mot de DIAGONALE, c'est
Philippe Marre qui créa en 1931-1932 les DIAGONALES DE FRANCE. Il s'agissait,
et il s'agit toujours, de relier entre eux, par les diagonales, les 6 sommets
de l'hexagone français : DUNKERQUE, STRASBOURG, MENTON, PERPIGNAN,
HENDAYE, BREST. Ceci donne 9 DIAGONALES différentes, et même 18 si l'on compte
les deux sens.
On comptera
27 tentatives avant la guerre, mais ce n'est qu'en 1949 que le règlement des
DIAGONALES DE FRANCE prend une forme, et surtout un esprit plus modernes,
dépourvus d'esprit de compétition, sinon contre soi-même. Entre-temps, les
DIAGONALES DE FRANCE avaient été offertes à la toute jeune Fédération Française de CycloTourisme."
René Chardon fut donc l'un des pionniers qui réalisa l'une de ces 27 tentatives d'avant-guerre !
Fin août 1933, il prit le train pour Brest avec en poche un
tableau des prévisions de ses temps de passage dans chaque ville qu'il doit traverser.
En effet, La Diagonale est une épreuve en randonnée libre qui n'a donc pas de
dates précises, à chacun de s'organiser selon son choix.
La tentative de René Chardon est ainsi annoncée dans la
presse :
"Les diagonales qui, à l'heure actuelle, ont toutes été
parcourues, reviendraient-elles à la mode ? M. René Chardon, de Changis, aurait
l'intention d'essayer sous peu Brest-Strasbourg. Le temps de Jean Marx (87
heures), réussi par des conditions épouvantables est facilement battable, mais
l'intérêt de ces randonnées réside-t-il tant que cela en une performance
exclusivement sportive ? Nous ne le croyons pas."
"Lagny-Thorigny-Sportif. —
Brest-Strasbourg — Mercredi 23 courant René Chardon se rendra à Brest
pour y prendre le départ d'une tentative « audaxieuse » contre le record des 87 heures
établi par Marx, grand routier de la Fédération cyclotouriste parisienne.
Voici les grandes lignes de ce raid qu'il va accomplir en
solitaire en roulant jour et nuit. Départ de Brest jeudi matin ; il doit passer
par Morlaix, Guingamp, Dinan, Pontorson, Mortain, Domfront, Argentan, Verneuil,
Dreux, Versailles, Choisy-le-Roi, Tournan, Fontenay-Trésigny, Esternay,
Sézanne, Vitry-le-Francois, Ligny-en-Barrois, Toul, Nancy, Blamont, Shirmeck,
le Donon, Molsheim et Strasbourg, soit 1.100 kilomètres.
Nous convions donc samedi à 14 heures, au monument, tous les
cyclistes des environs pour se joindre au groupe du L.T.S., conduit par le
vétéran Audax Dunas, dont ce brave Chardon est le plus digne élève, à se rendre
sur son passage, aux environs de Tournan et lui faire une ovation pour son
courage et lui donner un précieux réconfort moral pour la fin de sa randonnée.
Gageons qu'il y aura du monde parmi les jeunes que cet exploit peut laisser
rêveurs. En attendant la fin de ce raid, nous souhaitons que la température le
favorise et qu'il mène à bien sa téméraire entreprise... ce dont son président
ne doute nullement."
Le vendredi 25 août 1933, à 4 heures du matin, René Chardon
quitte l'Hôtel des Familles, rue Ambroise Thomas à Brest, après avoir fait
compléter sa feuille de contrôle de passage par le patron de l'hôtel.
Tout au long de sa route à travers la France, il a prévu de
s'arrêter 21 fois pour valider son passage.
Il pointe à Morlaix à 6H40
A-t-il le temps de voir les lavandières de Pontorson à 17 H
00 ?
Il est à Barenton en Normandie à 21 H 00.
Le samedi 26, au petit matin, après une nuit sur le vélo
(A-t-il dormi un peu dans un fossé ou dans une grange ? C'est peu probable...),
il pointe à Houdan au café de l'Union qui existe au moins depuis la guerre de
14-18... comme en témoigne cette carte
postale.La traversée de la région parisienne par la banlieue sud devait être
plus facile qu'aujourd'hui
La traversée de la région parisienne par la banlieue sud
devait être plus facile qu'aujourd'hui.
A Rozoy en Brie, il emprunte la Nationale 4 . Sans doute ses
camarades de club l'ont-ils accompagnés sur ce tronçon !
A Esternay, il pointe
à19 H 30 dans une épicerie. N'a-t-il pas trouvé de café ou d'hôtel
ouvert ?
Et il continue sa route vers l'orient. A 7 H 00 du matin le
dimanche, il est à Vitry le François. Sans doute s'est-il arrêter pour dormir
un peu sur les bords de la Nationale qui mène à Strasbourg.
Il passe Toul à 13 H 00...
... et Lunéville à 16 H 00.
Il arrive à Strasbourg à 23 H 00. Il vient de battre le
précédent record sur cette diagonale de 20 heures !
Sans doute fit-il de beaux rêves cette nuit-là à l'hôtel Terminus, le bien nommé...
En tout cas, sa feuille de contrôle de passage montre tous les arrêts réalisés lors de cette diagonale.
Et cette coupure de journal atteste la réussite de l'entreprise :
Brest-Strasbourg
1.100 kilomètres sont couverts par René Chardon, à
bicyclette, en 67 heures.
Ainsi que nous l’avions annoncé dans notre rubrique sportive
la semaine dernière. Chardon, du Lagny-Thorigny-Sportif, s'est mis en route le
vendredi matin 25 août à 4 heures, à Brest. Il touchait la capitale de
l'Alsace, Strasbourg, le dimanche soir à 23 heures, n'ayant pris que quelques
heures de repos à Fère-Champenoise. Voilà brutalement les faits de cette
formidable prouesse, formidable à tous points de vue, car elle fut accomplie
seul, de jour et de nuit, sauf aux environs de Paris où quelques amis lui
tinrent compagnie ; formidable surtout, car Chardon n'en tire aucun profit,
bien au contraire, ayant tout payé de sa poche, depuis son train qui l'amena à
Brest et celui qui le ramena de Strasbourg, jusqu'aux nombreux casse-croûte
qu'il absorba tout au long des 1100 kilomètres. Tout cela pour un peu de gloire
éphémère et surtout pour garder, impérissable dans le cours de sa vie, le
souvenir d'avoir fait « grand » d'avoir fait « à la française » quelque chose
que les jeunes de son âge, s'ils avaient eu le courage de l'accomplir,
n'eussent point manqué de se faire monnayer.
Il n'a même
pas la récompense de voir les grands journaux
sportifs souligner sa performance dûment contrôlée d'ailleurs, celle-ci ayant
été faite en dehors de toute publicité sportive.
La grande diagonale Brest-Strasbourg fut accomplie par Marx,
de Paris, l'an passé en 87 heures. Chardon, après mûre réflexion s'étant dit qu'il
pouvait faire mieux, partit donc après la moisson, travail pénible que
nécessite son métier de cultivateur et après trois jours et trois nuits sur les
routes d'Ouest en Est, abattit ce temps à 67 heures, soit donc 20 heures de
mieux.
Saluons donc largement l'élève de notre ami Dunas et
regrettons en passant que notre digne vétéran, qui ne peut plus à son grand
regret s'adonner à d'aussi belles
prouesses, ne produise pas
d'autres hommes de cette trempe
si spéciale doués de telles qualités morales et physiques.
En attendant le banquet
annuel qui sera cette année celui de Brest-Strasbourg, tous les
sportifs et les amis du L.T.S adressent
à René Chardon leurs plus vives
félicitations pour sa mémorable performance que beaucoup n'oseraient demander à
une automobile ordinaire.
Passionnant, merci Jean-Pierre
RépondreSupprimerSurtout, JP, n'hésite pas à nous redonner d'autres récits et d'autres docs " vintage " aussi passionnants que cette diago des temps héroïques !
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